En cette période de rentrée littéraire où comme à Gravelotte, les livres tombent sur les gondoles des libraires, il est de bon ton de s’extasier sur le dernier Despentes, le dernier Lola Lafon ou le dernier Nothomb (métonymies!). Et il est vrai que ces trois autrices n’ont plus grand chose à prouver de leur talent, pas plus d’ailleurs que beaucoup de leurs confrères de cette rentrée (Gaudé, Bouysse, Adam, pour ne citer qu’eux).
Alors, de quoi se plaindre, me direz-vous ?
De l’omniprésence de ces œuvres dans les médias, peut-être. Du fait que peut-être, ces merveilleux auteurs ne laissent que peu de place à d’autres, moins médiatisés, et pourtant tout aussi “bankable” , les auteurs de littérature de l’Imaginaire.
Ce qu’on désigne avec cette périphrase un peu floue, c’est la science-fiction, le fantastique et la fantasy (qui sont eux aussi de grands arbres ramifiés!), souvent considérés comme une littérature de gare, de “genres”, ou pire une littérature pour “gamins”, ou geeks. Or chacun sait que l’on doit choisir son camp: littérature adulte, réaliste, “blanche” (ainsi nommée par opposition au polar noir) ou littératures de l’Imaginaire. C’est méconnaître la qualité de la production actuelle, la puissance des thèmes évoqués et le style incomparable des auteurs contemporains.
J’en veux pour preuve cet article de Jean-Philippe Jaworski (l’une des plus belles plumes contemporaine du genre) et dont voici un extrait:
Que peut nous apporter la fantasy ?
Pour les tenants d’une littérature engagée, elle peut se faire apologue et proposer une éthique, au même titre que mythes et contes philosophiques.
Pour les tenants d’une littérature de divertissement, ce qui est plutôt mon cas, elle peut se faire régulatrice d’émotions, en particulier en proposant un enchantement dépourvu de toute arrière-pensée axiologique ou idéologique. En recourant à un merveilleux sécularisé, la fantasy réenchante alors l’existence sans la conditionner à une orientation religieuse, politique ou sociétale.
Enfin, la fantasy réactualise ou crée des motifs culturels qui, s’ils sont partagés par le public, finissent par renouveler le regard sur le monde. Même lorsqu’elle ne prétend pas dire le réel, la fantasy peut nous proposer des moyens, anciens ou nouveaux, pour le vivre et le transformer. Son applicabilité ne dit peut-être pas le monde tel qu’il est mais prépare parfois la culture telle qu’elle sera.
Alors j’aurais bien aimé voir quelques auteurs de l’Imaginaire ( Camille Leboulanger, Estelle Faye, Floriane Soulas, Lionel Davoust ou Alain Damasio, et combien d’autres !) sur le plateau de la Grande Librairie par exemple. Pour ceux qui demandent encore à être convaincus, rendez-vous aux Aventuriales (24-25 septembre à Ménétrol) ou aux Utopiales (du 29/10 au 1/11 à Nantes)!
Le reste de l’article de Jean-Philippe Jaworski est accessible sur le blog des Moutons Electriques (maison d’édition à suivre absolument), ici.
PS: cette année, Laurent Gaudé publie Chien 51, dystopie qui a su plaire à M. Trappenard…